Lors des séances de questions d’actualité au gouvernement du 26 juin 2018, André Gattolin, sénateur LaREM des Hauts-de-Seine, a interrogé le ministre Jean-Baptiste Lemoyne sur l’Agence européenne des réfugiés :
Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Baptiste Lemoyne. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
Depuis une semaine, les réunions européennes sur les questions des migrations et du droit d’asile se succèdent. Le sujet figurera également au sommet de l’agenda du Conseil européen qui se tiendra en fin de semaine à Bruxelles. Il y a urgence à définir des règles et des moyens d’action communs.
Toutefois, au regard des positions très divergentes en présence, il y a peu de chances qu’un accord unanime soit trouvé. L’Europe doit pourtant impérativement avancer, notamment sur la question de l’accueil des réfugiés, en trouvant une solution au refus des pays de Visegrad d’honorer leurs quotas d’« asilés », fixés à la suite de la crise migratoire de 2015.
Pour ce faire, plusieurs solutions sont évoquées. Très récemment, le Président Macron a suggéré de conditionner l’attribution de certains fonds structurels européens à l’accueil effectif de réfugiés. Si un tel instrument peut se révéler efficace, il nous faudra d’abord inscrire cette conditionnalité de principe dans le prochain cadre financier pluriannuel, ce qui n’est pas encore acquis.
Pour autant, ce type de mesure contraignante à l’encontre des États réfractaires devrait utilement s’accompagner de mesures d’ordre plus incitatif. La Commission envisage la création d’une agence européenne pour l’asile, dont les contours demeurent encore peu définis.
Certains suggèrent qu’une telle agence devrait prioritairement soutenir les municipalités ou les territoires acceptant d’accueillir des migrants, en leur octroyant des fonds pour l’accueil, ainsi qu’un « bonus » pour leur budget général. Cette contractualisation directe entre collectivités volontaires et Union européenne permettrait ainsi de contourner le refus de certains États.
Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous nous éclairer sur la position du Gouvernement à l’égard de ces différentes pistes concernant l’accueil des réfugiés ? (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.Monsieur Gattolin, l’Europe, on ne peut pas se le cacher, est à la croisée des chemins. Tout ce qui a été patiemment et laborieusement bâti depuis des décennies peut se retrouver défait en quelques mois ou quelques années. Le Brexit montre que le délitement peut être parfois très rapide.
L’Union européenne est soumise en ce moment à des tests de solidité et de souveraineté, pour ce qui concerne sa politique, tant commerciale que migratoire. C’est donc en commun que nous devons apporter des réponses fondées sur des principes simples, à savoir la responsabilité et la solidarité.
Un ensemble de mesures doivent être prises. Il convient tout d’abord d’améliorer la coopération avec les pays d’origine et de transit. De ce point de vue, la France a pris des engagements forts sous la houlette du Président de la République, puisqu’il s’agit d’augmenter notre aide publique au développement, qui devra atteindre 0,55 % de notre revenu national brut. Le Premier ministre évoquait d’ailleurs le sujet de l’Alliance pour le Sahel ce matin même avec son homologue malien.
Il faut ensuite éviter que certains demandeurs d’asile, légitimement éligibles à ce droit, n’aient à faire cette traversée de la mort. C’est tout l’objet des missions de l’OFPRA déployées dans un certain nombre de pays, notamment la Libye, le Tchad et le Niger. Elles identifient les personnes dont les droits en la matière sont imprescriptibles.
En outre, il est nécessaire de renforcer les moyens de l’Union européenne pour la protection des frontières extérieures. Ainsi FRONTEX doit-il passer d’un effectif de 1 200 personnes à un effectif de 10 000 personnes.
Il existe donc une large palette de solutions. La mise en place d’une agence européenne pour l’asile, que vous venez d’évoquer, est une idée fortement soutenue par la France et l’Allemagne. Elle fera l’objet des débats qui se tiendront ces prochains jours. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)