A l’occasion du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, André Gattolin est intervenu vendredi 5 avril pour souligner les contradictions du groupe UMP dans sa volonté de faire obstruction au travail parlementaire.
En préalable, je voudrais remercier très sincèrement l’opposition sénatoriale, et le groupe UMP en particulier.
Sénateur encore assez novice, j’avoue que je ne connaissais pas l’ensemble des procédures préalables visant à rejeter un texte sans l’avoir étudié au fond. Aujourd’hui, cette lacune est comblée et je ne pense pas que ce soit simplement une volonté pédagogique à mon endroit ou à l’endroit des sénateurs récemment élus ! Je pense qu’il y a vraiment une procédure visant à bloquer, à retarder ce texte.
Je m’interroge simplement sur la cohérence. Comment peut-on demander de voter une motion référendaire, laquelle appelle à recourir au suffrage universel direct et, en même temps, expliquer que cette loi ne peut pas être discutée parce qu’elle est inconstitutionnelle ? Je suis vraiment très novice, donc, j’aimerais qu’on m’explique !
Mais je comprends qu’il y a des jeux, des procédures parlementaires qui consistent à s’exprimer le plus longtemps possible sur tout un tas de choses.
Je voudrais simplement revenir sur le fond du débat. Depuis l’adoption de la loi sur le PACS en 1999, les parlementaires écologistes ont toujours plaidé en faveur d’interventions du législateur pour remettre une réelle égalité des droits devant le mariage. Les partenaires du PACS, il faut bien le dire, n’ont pas accès aux mêmes droits que les couples mariés. Bénéfice de la pension de réversion, adoption des enfants du conjoint, protection juridique des enfants au sein d’une famille homoparentale, autant de sujets qui révèlent des inégalités de droit et qui justifient pleinement une évolution de notre législation.
Il est donc, à notre sens, temps de légiférer pour réparer ces inégalités et permettre de trouver des solutions à des situations humaines déjà existantes. Nul ne peut fermer les yeux face aux difficultés du quotidien qui sont celles des couples homosexuels et face au besoin de légiférer en faveur de l’amélioration des droits.
L’union civile sans filiation que vous proposez est une sorte de mariage au rabais. Outre qu’elle est discriminatoire, on va superposer un nombre de types d’unions absolument incroyable ! On aura le PACS, l’union civile, le mariage civil et il y aura encore, et merci, heureusement le mariage religieux !
Je pense donc qu’il vient un moment où la logique législative doit être rationnelle et rationalisée. Et surtout, on a le droit de débattre de cela au Parlement parce que l’objet même de ce texte, celui de l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe, relève strictement et précisément de la compétence du Parlement ! Et il est de notre responsabilité de parlementaires d’honorer la confiance que les citoyens nous ont accordée et de respecter les engagements pris devant les électeurs. C’est notre devoir d’élus de la nation de faire voter des lois qui assurent l’égalité entre tous les citoyens et qui protègent les plus faibles contre toutes les discriminations.
C’est pourquoi le groupe écologiste ne votera pas cette motion tendant à opposer la question préalable, qui cache difficilement, sous des arguties juridiques très variées, la volonté de faire obstruction au travail parlementaire et à un débat de fond, urgent et nécessaire.
Pour revenir sur la fort sympathique question référendaire qui a été posée, j’aimerais qu’on se penche sur l’utilisation du référendum, notamment du référendum d’initiative populaire dans d’autres pays, en Europe, par exemple.
En Italie, on peut demander un référendum d’initiative populaire. Il est, d’abord, abrogatif d’une loi existante, ce qui n’est pas le cas ici. Et il existe quelque chose qui permet de hiérarchiser, au moins dans le temps, les différentes légitimités issues du suffrage universel, c’est la limitation ratione temporis. Avec cette disposition, il est permis de procéder à des référendums ou interdit d’y procéder pendant de nombreux mois précédant une élection générale et lui succédant. En Italie, on considère, en effet, que les élus au suffrage universel direct, pour nous, le Président de la République ou les parlementaires, mais aussi les élus au suffrage universel indirect, disposent, pendant une période donnée, qui représente la moitié de la législature, la pleine légitimité pour légiférer sur des sujets très variés. On ne peut alors recourir au référendum.
Je vous invite donc à vous intéresser aux différents droits constitutionnels et aux règles relatives au référendum en vigueur dans les autres pays. Ce serait fort utile avant de proposer une procédure aussi originale que la question référendaire !