Les dernières semaines ont été riches en réunions de la commission des affaires européennes, en particulier « hors les murs ». Le Commissaire européen en charge de l’emploi, László Andor, a ainsi été auditionné conjointement par les commissions des affaires européennes de l’Assemblée nationale et du Sénat le 5 février, à l’Assemblée nationale. La commission des affaires européennes du Sénat a quant à elle effectué un déplacement à La Haye pour y rencontrer des responsables d’Eurojust et d’Europol, lors d’une délégation conduite par André Gattolin.
Vous trouverez ci-dessous les interventions d’André Gattolin à l’occasion de ces différentes réunions, ainsi que des liens vers leurs compte-rendus exhaustifs.
Audition de László Andor, Commissaire européen en charge de l’emploi – Assemblée nationale, le 5 février 2014
« ANDRÉ GATTOLIN – Monsieur le commissaire, l’Europe s’est déjà trompée en créant l’euro sans s’être dotée d’une gouvernance économique. Vous nous présentez un catalogue de quatre mesures dont j’ai du mal à voir l’aspect social ! Je veux bien qu’il faille mettre à niveau la formation des jeunes pour répondre au marché, mais faut-il pour cela créer des indicateurs ? Où est notre politique industrielle ? Où est notre politique commerciale ? Nous avons ouvert nos frontières à des partenaires qui ne respectent pas les règles sociales et nous allons nous contenter d’observer la misère et les drames sociaux ! Quand Jacques Delors a commencé à parler de politique sociale, l’Europe ne comptait que 15 pays membres, et nous n’avons pratiquement pas avancé. Les profondes inégalités au sein de la zone euro existaient bien avant la crise. L’Europe regroupe aujourd’hui 28 pays et il est 12 encore plus difficile d’avancer. Nous devons envisager une gouvernance véritablement politique. En tant qu’élu national et militant européen depuis plus de trente-cinq ans, je ne me reconnais pas dans votre discours et je crains, monsieur le commissaire, que si vous deviez vous soumettre à des élections, comme les parlementaires européens, vous n’ayez bien du mal à être élu. Nous sommes là pour essayer de vendre un discours européen et vous nous parlez d’observation de la misère sociale, d’intégration de plans en la matière dans les contraintes du semestre européen, de dialogue social. Vous ne pouvez pas demander aux Européens d’accepter des conditions de marché de plus en plus difficiles, des salaires de plus en plus faibles et des emplois de plus en plus précaires. Nous ne vivons pas dans le même monde ! »
Délégation de la commission des affaires européennes du Sénat à Europol et Eurojust – La Haye, les 11 et 12 février 2014
1. EUROPOL
« ANDRÉ GATTOLIN – Je voudrais tout d’abord vous présenter mes plus vifs remerciements, Monsieur le Directeur, pour l’accueil que vous réservez à la délégation de la commission des affaires européennes du Sénat.
Notre Président M. Simon Sutour est actuellement retenu en Jordanie, où il participe à une conférence de l’Union pour la Méditerranée. Il vous prie de bien vouloir excuser son absence. C’est en ma qualité de Secrétaire du bureau de la commission que j’ai l’honneur de le représenter.
Le Sénat est très attentif au développement de la coopération policière et judiciaire dans l’espace européen. Il a suivi avec beaucoup d’intérêt la mutation d’Europol. Cet office, créé par voie conventionnelle dès 1995, est devenu une agence européenne pleine et entière en 2009.
L’évolution d’Europol est caractéristique de celle de ce qui fut longtemps appelé le « troisième pilier » de l’Union. Europol est désormais un « organe de coopération intégré ».
Par ailleurs, depuis le traité de Lisbonne, les parlements nationaux sont associés « au contrôle des activités d’Europol ». C’est dire que nous sommes conduits à renforcer nos relations, à multiplier nos échanges.
Nous vous avons fait parvenir un questionnaire. La question de la fusion Europol-CEPOL est à l’ordre du jour. S’agit-il d’une pure mesure d’économie ou au contraire d’une synergie utile de logiques et de moyens ?
Plus généralement, nous souhaiterions des réponses concrètes à des questions concrètes. Quelle valeur ajoutée Europol a-t-il apportée à l’action des services de police des différents États membres ? Quel bilan peut-on tirer de la gestion par Europol des fichiers d’analyse ? Quelles mesures permettent de garantir la protection des données ?
Peut-on aujourd’hui parler d’un espace policier européen comme on parle de l’espace judiciaire européen ?
J’espère que nos échanges permettront d’approfondir tous ces sujets ! »
2. EUROJUST
« ANDRÉ GATTOLIN – Je voudrais tout d’abord vous présenter mes plus vifs remerciements, Madame la Présidente, pour l’accueil chaleureux que vous réservez à la délégation de la commission des affaires européennes du Sénat.
Notre Président M. Simon Sutour est actuellement retenu en Jordanie, où il participe à une conférence de l’Union pour la Méditerranée. Il vous prie de bien vouloir excuser son absence. C’est en ma qualité de Secrétaire du bureau de la commission que j’ai l’honneur de le représenter.
Lors de votre venue à Paris au mois de novembre dernier, nous avons déjà eu le plaisir de vous entendre. Vous aviez évoqué l’activité d’Eurojust, sa coopération avec d’autres organismes européens tels que Frontex, Europol, le collège européen de police, le réseau judiciaire européen, l’Office européen de lutte anti-fraude…
Avec beaucoup de franchise, vous nous avez livré votre point de vue sur le projet de réforme d’Eurojust dans la perspective de la création du Parquet européen prévu par le traité de Lisbonne et voulu par la Commission.
Nous aurons de nombreuses questions à vous poser à ce sujet. La réforme fait débat partout en Europe. Où en est la négociation ? Vers quel type de Parquet européen se dirige-t-on : centralisé ou collégial ? Qui le contrôlera ? Est-il probable que l’institution fonctionnera dans le cadre d’une coopération renforcée ? Quel sera le sort d’Eurojust ?
Cette affaire du Parquet européen retient toute l’attention du Sénat. Au cours de l’année 2013, il a adopté deux résolutions européennes, le 15 janvier et le 28 octobre. La seconde de ces résolutions fut un avis motivé précisant que, du point de vue du Sénat, qui approuve, par ailleurs, le principe de la création d’un Parquet européen, la proposition de la Commission, en faisant le choix d’une formule très intégrée, centralisatrice et directive, ne respectait pas, en l’état, le principe de subsidiarité. Nous aurons l’occasion d’en reparler.
Vous aviez souhaité voir Eurojust bénéficier du droit de déclencher des enquêtes. Il semble que le projet de la Commission vous donne satisfaction sur ce point. Pourriez-vous nous livrer votre point de vue sur le sujet ? Les mesures qui tendent à garantir la protection des données vous paraissent-elles suffisantes ?
Le Sénat a toujours défendu l’espace judiciaire européen. La reconnaissance mutuelle des décisions de justice lui est apparue, en particulier, comme une forme efficace de lutte contre la criminalité organisée transfrontalière.
Renforcer cet espace est précisément la raison d’être d’Eurojust.
À l’issue de notre rencontre au Sénat, le 14 novembre dernier, notre Président, Simon Sutour, vous avait annoncé que nous vous rendrions votre visite. La chose est faite. Au cours de nos échanges, nous allons pouvoir approfondir et actualiser tous ces sujets. »