Intervention lors de la discussion du projet de loi portant réforme ferroviaire

22/07/2014 Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser mon collègue Ronan Dantec, chef de file du groupe écologiste sur ce projet de loi, qui est retenu aujourd’hui par d’autres obligations. Le groupe écologiste a voté en faveur de ce projet de loi, considérant qu’une rénovation du système ferroviaire français était aujourd’hui nécessaire.

Le contenu du texte initial a été assez substantiellement modifié lors de son passage dans les deux chambres du Parlement, et nous nous en félicitons, car il s’en est trouvé indiscutablement amélioré.

Les écologistes ont défendu des positions ambitieuses et, bien entendu, sur certains points, nous considérons que le texte issu de la CMP ne va encore pas assez loin.

C’est notamment le cas s’agissant de la dette historique. Certes, le projet de loi contient désormais plusieurs dispositions visant à préserver la SNCF de tout endettement qui dégraderait trop significativement sa situation financière grâce à l’adoption d’une règle d’or en matière de financement des projets d’infrastructures. C’est une très bonne nouvelle.

 

Cependant, nous savons que la dette, qui croît de plus d’un milliard d’euros par an, doit être requalifiée en dette d’État, et portée comme telle, pour cesser de plomber les comptes du système ferroviaire.

Or, sur ce point, le texte ne va pas jusqu’au bout puisqu’il prévoit uniquement que, avant deux ans, un rapport du Gouvernement « examine[ra] les conditions de reprise de tout ou partie de cette dette par l’État ». Nous nous interrogeons sur la valeur contraignante de cette disposition et, de surcroît, nous considérons que le délai de deux ans est bien long pour une situation connue depuis la séparation de SNCF et de RFF, en 1997.

Par ailleurs, plusieurs groupes politiques, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, souhaitaient que soit introduite une loi d’orientation quinquennale sur la mobilité. La proposition, très proche d’une programmation pluriannuelle de la mobilité débattue au Parlement et soumise à son vote, a été repoussée de peu. Nous le regrettons, car elle participait d’une logique de renforcement de l’État stratège, tout en permettant de donner davantage de cohérence aux politiques de mobilité, de manière qu’elles répondent aux enjeux sociaux, environnementaux et économiques.

Une des dispositions du projet tend, en revanche, à apporter de la cohérence aux politiques de mobilité : la création d’un schéma national des transports, véritable outil de pilotage stratégique de la politique des transports, qui permettra d’entrer dans l’ère moderne de la mobilité.

L’intermodalité entre le train et le vélo a également été améliorée, là aussi grâce à l’adoption d’amendements écologistes.

Le rôle de l’État a été globalement réaffirmé, mais les écologistes se sont aussi mobilisés pour que la place des régions soit renforcée, car elles procurent les deux tiers du financement public du système ferroviaire et assurent des responsabilités croissantes en matière de mobilité. À cet égard, nous nous félicitons de l’introduction d’une part régionale de versement transport interstitiel. Nous avons bien noté le désaccord du Gouvernement sur ce point, mais une majorité de parlementaires, conscients des immenses besoins de financement en matière de transport, a souhaité que cette mesure fiscale voie le jour, dans l’intérêt des habitants et de la qualité des services publics de transport.La composition de la direction collégiale des trois instances constituant le nouveau groupe a fait l’objet d’importants débats et les avancées obtenues par les écologistes en la matière sont au cœur de nos engagements en faveur de la modernisation des instances de gouvernance de tous nos services publics.

Si nous n’avons pas obtenu que les régions soient davantage représentées au sein de la direction de la SNCF, nous nous réjouissons d’avoir obtenu que la parité entre les femmes et les hommes soit appliquée immédiatement dans les instances dirigeantes du nouveau groupe. C’est désormais un « classique » de l’action des écologistes au Sénat, depuis l’introduction, obtenue de haute lutte, de la parité au sein du Haut Conseil des finances publiques et dans de nombreuses autres instances dirigeantes de l’État. Cette introduction systématique de la parité, au moins dans les organes publics décisionnaires, est pour nous tout à fait essentielle.

Nous avons également obtenu que les associations de protection de l’environnement deviennent membres du conseil d’administration de SNCF Réseau, de SNCF Mobilités et du Haut Comité du système de transport ferroviaire. La prise en compte des enjeux environnementaux est nécessaire à une bonne gouvernance de la SNCF. Ce point était déjà inscrit dans le Grenelle de l’environnement, mais il était nécessaire de l’entériner dans la loi.

Par ailleurs, la représentation des usagers a été acquise par voie d’amendement écologiste à l’Assemblée nationale. C’est pour nous une avancée sociétale majeure, qui fait écho à ce que nous avions déjà imposé, là aussi de haute lutte, à l’automne dernier, au Sénat comme à l’Assemblée nationale, c’est-à-dire la représentation des associations de consommateurs au sein des conseils d’administration des sociétés nationales de production de l’audiovisuel public.

Si l’on veut un service public moderne, il va falloir mettre fin au système traditionnel de la représentation de l’État et d’une représentation plus ou moins marginale des syndicats de salariés. La société civile existe : c’est pourquoi nous voulons, en plus du dialogue social, un dialogue sociétal. En tout cas, cette prise en compte de la société civile dans les nouvelles entités de la SNCF fera date.

En outre, le volet social a été renforcé ; je ne reviendrai pas sur cet aspect, qui a déjà été largement développé. Il s’agit d’un bon point, propre à rassurer aujourd’hui toutes les familles de la SNCF. Enfin, ce texte est pleinement eurocompatible. Il permet de nous adapter au cadre européen, sans pour autant affecter les droits sociaux des agents ni ouvrir la porte à une concurrence qui serait synonyme de délitement de la qualité de ce service public essentiel qu’est le transport ferroviaire.

Pour conclure, je dirai que le vrai risque, aujourd’hui, est celui de la concurrence du transport routier à l’égard du ferroviaire. Nous sommes conscients qu’il y a encore fort à faire pour que le report modal de la route vers les autres modes de transport moins polluants devienne une réalité. Ce projet de loi, loin de régler toutes les difficultés de l’univers du transport, va cependant dans le bon sens pour ce qui concerne le ferroviaire. C’est donc tout naturellement que le groupe écologiste le votera.