L’examen du Projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2015 était précédé d’un débat sur l’orientation des finances publiques. André Gattolin intervenait en hémicycle, le 8 juillet 2016, pour le groupe écologiste.
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« Monsieur le président, Monsieur le ministre, Mes chers collègues,
Ce projet de loi de règlement est – déjà – le dernier que nous étudierons dans cette législature.
Ce débat nous fournit donc une première occasion de nous retourner rapidement sur les éléments marquants de la politique économique et budgétaire de ces dernières années.
Dès l’ouverture du quinquennat, nous avons manqué l’occasion de renégocier le Pacte budgétaire, qui s’impose désormais comme le cadre de nos finances publiques, ou au moins d’en exiger une contrepartie économique solide – je n’ai pas le temps de revenir ici sur l’insuffisance du plan Juncker.
D’un point de vue plus technique, lors de la ratification du TSCG, les écologistes avaient dénoncé l’incongruité qu’il y a à fonder tout l’édifice de la convergence budgétaire sur une notion aussi mal définie que la croissance potentielle.
Nous n’avions pas été entendus, mais je constate que la Cour des comptes, dans son dernier rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, développe une analyse similaire.
Après le TSCG, le Gouvernement a fait adopter à l’automne 2012 le CICE, sur le modèle de la TVA sociale qu’il avait pourtant annulée pendant l’été.
Les écologistes s’étaient alors opposés, non pas à l’idée de soutenir les entreprises, mais à l’absence de conditions posées à un crédit d’impôt aussi massif. Près de quatre ans après, quel est le bilan ? D’après une étude récente de l’OFCE, le taux de marge des entreprises s’élève désormais à 39 %, soit le taux le plus haut depuis 1980. Dans le même temps, la France, qui a versé 47 milliards de dollars de dividendes en 2015, est le pays de la zone euro dont les entreprises rémunèrent le plus leurs actionnaires. Quant aux emplois promis, selon les premières estimations, seuls environ 100 000 ont été créés.
Sur le plan budgétaire, cette politique s’est traduite par un report notable de la fiscalité des entreprises vers les ménages. Comme l’a montré notre rapporteur général, la part de la charge fiscale des ménages dans les prélèvements obligatoires a augmenté de deux points depuis 2011, tandis que celle des entreprises a baissé de quatre points. C’est d’ailleurs essentiellement à cette fin, et non pour résorber le déficit public, que le Gouvernement a procédé depuis le début du quinquennat à des coupes claires dans nombre de crédits budgétaires. Toutefois, l’impact direct de ces coupes sur l’économie n’a pas été aussi néfaste que ce qu’on aurait pu craindre – et il faut s’en réjouir. En effet, la Banque centrale européenne a soutenu l’activité par une politique monétaire très accommodante, allant même jusqu’à outre-passer son statut, pour racheter de la dette souveraine sur les marchés secondaires. De même, la baisse historique du cours pétrole, liée à d’insondables stratégies de concurrence entre pays producteurs, constitue une aubaine bienvenue.
Si le pire a donc été évité à court terme, on peut en revanche être légitimement préoccupé pour l’avenir. ! Rien qu’en 2015, les dépenses publiques d’investissement ont reculé d’un montant de 4,1 milliards d’euros, soit de 5,1%.
Quant aux services publics, ils accumulent, année après année et dans une certaine indifférence, baisses de qualité et difficultés de fonctionnement.
Je vais prendre l’exemple de la mission « écologie », à laquelle vous comprendrez que j’accorde un intérêt particulier.
Elle affiche en 2015 une exécution supérieure de 2,3% à la prévision.
Mais il s’agit d’un artefact, dû à un changement de périmètre pour près de 800 millions d’euros. La neutralisation de ce transfert conduit en réalité, en 2015, à une sous-exécution de la mission de près de 6% par rapport à la prévision.
Plus généralement, les crédits consommés par la mission ont diminué de près de 22 % entre 2011 et 2015, passant de 12,4 à 9,7 milliards d’euros (hors PIA). Les effectifs ont quant à eux été amputés de 7476 emplois en trois ans, soit une baisse d’environ 20%.
Evidemment, toutes ces coupes ne sont pas indolores. Dans le classement de performance, qui est indexé sur le nombre d’indicateurs atteignant l’objectif initialement fixé, la mission « écologie » se classe 24e sur 28.
Le personnel restant, lui, dénonce la désorganisation du travail et la dégradation des contrôles de préservation de l’environnement. Le fonctionnement de l’Agence française pour la biodiversité, pas encore installée, suscite même déjà de nombreuses inquiétudes.
Quant à la fiscalité écologique, qui a augmenté au cours du quinquennat, et c’est une bonne chose, elle est principalement utilisée pour le financement du CICE, ainsi que pour compenser le montant de la CSPE, qui a été maintenue artificiellement basse, afin de continuer à laisser croire à une électricité française bon marché.
Pour autant, malgré notre vision critique, nous n’oublions pas que ce n’est pas sur la stratégie qu’il nous revient aujourd’hui de voter, mais sur le règlement.
Attendu que les comptes 2015 ont été certifiés par la Cour des comptes, nous voterons donc en faveur de ce projet de loi, comme nous avions voté en son temps, avec le groupe socialiste, le projet de loi de règlement pour 2011.
Je vous remercie. »